La relation entre l’inflation et le chômage a longtemps interpellé les économistes, donnant naissance à des analyses et des théories cherchant à décrire et à prédire le comportement économique. Une des représentations les plus célèbres de cette relation est la courbe de Phillips, concept qui valide un lien inverse entre l’inflation et le taux de chômage. Toutefois, la validité de cette courbe a évolué au fil des décennies, sous l’influence de divers facteurs économiques et de nouvelles approches théoriques.
Sommaire
Les fondements de la courbe de phillips
L’histoire de la courbe de Phillips débute avec l’économiste William Phillips, qui, à travers une étude menée au Royaume-Uni entre 1851 et 1957, révèle une relation négative entre le niveau des salaires et le taux de chômage. Cette constatation suggère qu’une augmentation des salaires entraine une baisse du taux de chômage et vice-versa, une idée initialement intuitive mais désormais soutenue par des données empiriques. Cette découverte donne naissance à la relation de Phillips, qui suggère un taux de stabilité des salaires, où une certaine proportion de chômage empêcherait tout mouvement de salaire à la hausse ou à la baisse.
Cependant, les économistes Paul Samuelson et Robert Solow vont plus loin dans les années 1960 en reliant directement cette idée au concept d’inflation, introduisant une version de la courbe de Phillips qui fait le lien entre le taux de chômage et l’inflation. Cette version illustre que lorsque le chômage est bas, les prix ont tendance à augmenter, et lorsque le chômage est élevé, les prix ont tendance à stagner ou à baisser.
Evolution et critique du concept de la courbe de phillips
L’efficacité de la courbe de Phillips comme outil de prévision économique est mise à l’épreuve durant les années 1970 avec l’apparition de la stagflation, un phénomène économique où inflation et chômage élevés coexistent, contrairement à ce que la courbe de Phillips prévoyait. Cette période marque un tournant, révélant les limites du modèle en situation de chocs pétroliers et d’ouverture économique mondiale, illustrant que les hausses de prix liées à des facteurs extérieurs peuvent en fait réduire l’emploi.
De cette critique emergent de nouvelles théories, notamment celle de Milton Friedman qui propose un regard critique sur la courbe de Phillips à travers le concept d’illusion monétaire. Friedman suggère que l’effet à court terme observé entre inflation et baisse du chômage est temporaire, menant inévitablement à une demande de hausse salariale par les travailleurs, qui neutralise l’effet initial sur le chômage. Cette réévaluation mène à l’idée qu’à long terme, aucune relation stable n’existe entre inflation et chômage, posant l’existence d’un « taux de chômage naturel ».
En poursuivant cette remise en question, Robert Lucas et Edmund Phelps introduisent la théorie des anticipations rationnelles, postulant que les acteurs économiques, intégrant les comportements passés et les politiques monétaires, n’agiront pas de manière à reproduire les erreurs passées liées à l’inflation. Cela conduit à une vision où la courbe de Phillips se verticalise, indiquant une absence de compromis inflation-chômage à long terme.
La courbe de phillips : entre théorie et réalité
La pertinence de la courbe de Phillips dans le contexte actuel est un sujet de débat. Les économistes continuent d’examiner le lien entre inflation et chômage en tenant compte des transformations économiques globales, des politiques gouvernementales et des attentes ajustées des acteurs économiques. Bien que la courbe initiale de Phillips puisse sembler réduite dans son application directe, elle offre un cadre pour comprendre les dynamiques inflationnistes et leur impact potentiel sur l’emploi.
Une analyse de l’INSEE en 2018 révèle que, bien que la relation entre inflation et chômage ne soit plus aussi prononcée qu’auparavant, elle n’a pas complètement disparu en France. Ce constat suggère que, malgré les critiques et les évolutions théoriques, le concept de la courbe de Phillips conserve une certaine valeur explicative, modulée toutefois par la complexité accrue des économies modernes.
Finalement, la courbe de Phillips demeure un élément fondamental dans le domaine de la macroéconomie, fournissant une base pour l’analyse des compromis entre inflation et chômage. Toutefois, les économistes et les décideurs politiques doivent rester attentifs aux multiples facteurs qui peuvent influencer cette relation, incluant les contextes économiques internationaux, les politiques monétaires et fiscales, et les attentes des consommateurs et des entreprises.
Année | Taux de chômage (%) | Inflation (%) |
---|---|---|
1960 | 2,5 | Stabilité |
1970 | Augmentation | Augmentation |
2018 | Variable | Variable |
Cet article a exploré la dynamique entre chômage et inflation à travers la lens de la courbe de Phillips, en soulignant l’évolution de son applicabilité au fil du temps. En dépit des contestations et des adaptations théoriques, cette relation demeure une pierre angulaire pour comprendre les enjeux macroéconomiques actuels, tout en reconnaissant la nécessité d’approches adaptées aux réalités économiques complexes d’aujourd’hui.